the taste of dreams.

De signe astrologique Vierge, Ari en est la représentation parfaite, jusqu'à ses moindres petites manies. Il n'a toujours visé qu'un truc : la stabilité. Que ce soit au travail ou dans sa vie personnelle, il fonctionne à l'ancienne, et jusqu'ici, ça lui a toujours rapporté gros. ◦ L'environnement sain au coeur duquel il a grandi en est pour beaucoup. Dans le confort d'un foyer aimant, aux côtés de quatre soeurs insupportables, mais pour qui il donnerait sa vie. Puis ses parents, ces âmes charitables qui aujourd'hui, quarante ans plus tard, illustrent toujours l'idée de l'amour idyllique, celui avec un grand A. Depuis qu'Ari est haut comme trois pommes, ils ont tout donné pour offrir une vie des plus aisées à leurs enfants, et il leur en sera éternellement reconnaissant. ◦ Un tel épanouissement a d'autant plus été propice au développement créatif du jeune homme. À l'opposé des enfants de son âge, ce n'était pas le dessin qui animait ses temps libres, mais plutôt l'écriture. Ici et là, il gribouillait quelques mots, quelques rimes. Il était doué, il avait cette petite étincelle qu'on ne déniche que chez les naturels, et il le savait. ◦ À seize ans, après voir participé à un concours intercollégial d'écriture, un agent de l'ouest de l'Irlande l'approche pour lui offrir la chance d'une vie : un contrat de quatre ans avec une maison d'édition de Dublin. Il a mis deux ans à écrire son premier roman, et la dernière année de labeur, il s'est même exilé en banlieue de Londres pour boucler le précieux. Il n'a depuis jamais quitté Wexford aussi longtemps, que quelques semaines à la fois pour une tournée de promotion ou des vacances en famille. ◦ Son contrat a bien sûr été prolongé et les succès se sont enchaînés à la vitesse de l'éclair. Un joli mixte entre romans policiers et essais poétiques, ces derniers rencontrant une popularité moins accrue, au plus grand dam d'Ari, qui s'est alors résigné une bonne fois pour toute à vivre de son premier amour, la poésie. ◦ Son deuxième amour, ce fût Neve. Il la voit encore entrer dans cette librairie de Waterford où il était de passage, comme si c'était hier. Sa chevelure dorée visible des kilomètres à la ronde, son sourire étincelant, ses yeux pétillants, aucun détail ne pouvait lui échapper. Laissant ses admirateurs au point de rencontre, carrément hypnotisé par la beauté de cette inconnue, il s'était présenté à elle avec une poignée de main jointe et tremblotante, ce qui a pourtant su charmer la demoiselle puisque, trois ans plus tard, ils s'unissaient devant Dieu et leurs proches, en pleine nature nordique. ◦ Les enfants ont tardé à suivre. Non pas par manque de volonté, mais par conflit de priorités. Après le mariage, Ruari enfilait les séances d'autographes et la sortie de son huitième roman n'a fait qu'enflammer la promotion. Puis lorsqu'il fut enfin prêt à faire une pause pour se concentrer sur l'avenir de son couple, Neve fût promue et ne voulut pas tout foutre en l'air, elle qui avait attendu ce moment depuis si longtemps. La grossesse est donc arrivée sans être réellement prévue, mais plus que désirée. Et la surprise fut de taille lors de la première échographie, à l'annonce de deux battements cardiaques. ◦ Le bonheur était à son comble, et le jeune père ne vit pas l'orage qui se profilait à l'horizon. Il était à l'extérieur du pays lorsque c'est arrivé ; le décès de sa soeur. Il refuse de dire tout haut qu'il s'agit plutôt d'un suicide, lui qui est nécrophobe. Mais ça le hante sans cesse, et il lui arrive encore de se réveiller au beau milieu de la nuit, couvert de sueur, les tympans traumatisés par les pleurs d'Aslinn, pure fabrication de son esprit tourmenté. ◦ Depuis le terrible incident, il remet tout en question, ou presque. Il s'efforce néanmoins de pousser Blaithin, Meave Siobhàn et Neill à réaliser leurs rêves, et surtout, à s'assumer pleinement. Un conseil qu'il devrait sans doute suivre lui-même.

en vrac Le thé vert est sa boisson favorite. Il entretient un petit jardin de fines herbes dans la cour de sa demeure champêtre. Il n'a jamais trompé sa femme, malgré les rumeurs qui ont fait la une des journaux nationaux quelques années plus tôt. Il aime un peu trop le karaoké malgré son incapacité à pousser une seule note juste. Il préfère les bains moussants aux douches. Il accompagne ses filles chaque dimanche à leur cours de ballet, sans exception. Lorsqu'il est anxieux, il ne peut s'empêcher de se ronger les ongles. Il lit le tout premier roman d'Ernest Hemingway, The Sun Also Rises, au moins deux fois par an. Il ne supporte pas l'accent british. L'odeur du safran lui lève le coeur. Chacun de ses voyages à New York se termine par une pièce de Broadway. Il devrait porter des lunettes, mais il les déteste. Le son de la pluie le réconforte.