O1 la famille, ça a toujours été important. plus important que tout. t'as toujours voulu essayer de rendre tes parents fiers de toi. le premier à vouloir partir en mer avec papa. pas un pêcheur né. t'es pas assez patient, pas assez calme pour ça, mais la volonté a toujours été présente. ta famille, tes parents, ton frère et tes sœurs, ça a toujours été le plus important, malgré la pudeur dont tu peux faire preuve. et aujourd'hui, face à ce drame, face à la disparition de ton père, t'as l'impression d'être le vilain mouton noir, celui qui se noie, peine à sortir la tête de l'eau, comme attiré tout au fond des abysses, n'arrivant pas à te défaire des chaînes te retenant au fond.
O2 jules. pour jules. peut-être pour juliette. ça a été un mystère de trop longues semaines, et puis finalement le courage d'aller lui parler. le courage d'engager une discussion avec l'nouveau. la nouvelle. je préfère jules. quelque simples mots. jules comme un garçon ? - ouais. l'affaire a été réglée. vous aviez quoi, dix-sept, dix-huit ans ? ça semblait facile, loin du monde. jules, ça a été ton véritable premier petit-ami. déjà un peu d'expérience derrière toi, mais rien qui n'a jamais été aussi fort et aussi important que jules. et tu t'en fichais bien, toi, du vernis sur ses ongles, de sa voix pas aussi grave qu'elle ne devrait l'être, de la bande dissimulée sous les vêtements. tu l'aimais comme ça, c'est tout.
O3 des garçons, des filles, depuis cette époque ta vie sentimentale est catastrophique. sans doute que c'est parce que t'as jamais retrouvé quelqu'un que t'as autant aimé que jules, ou peut-être parce que justement, tu aimes trop, trop fort, trop rapidement. votre histoire a terminé par s'arrêter, c'est comme ça, c'est la vie, mais toi depuis tout ce temps, tu vogues en mer inconnue.
O4 tu fumes - depuis trop d'année, ça, c'est certain. et t'avais bien essayé d'arrêté, c'était pas si mal y'a quelques mois encore. mais autant dire que depuis la disparition de ton père, c'est pire qu'avant, sans doute. clope au bec, goudron dans les poumons, et ta mère sur le dos à te scander qu'elle veut pas te voir crever d'un cancer.
O5 puis tu bois aussi. c'est pareil, c'étaient des déboires d'adolescent, et c'est devenu un moyen d'essayer d'oublier. c'est clairement pas la solution, tu joues au mec qui gère, aux sourires qui reviennent doucement sur les lèvres, mais derrière, c'est souvent un verre ou deux de trop, pour que la douleur s'éloigne, au moins le temps de quelques heure d'un sommeil agité.
peintre agité, âme loin des couleurs, artiste raté de ton propre avis, les doigts pas si maladroits quand on observe les toiles
- frère présent, mais pas démonstratif, pudeur familiale
- fils aux yeux grands ouvert, papa ce héro qui parait en mer
- homme perdu dans un monde qui lui semble soudainement trop. trop grand, trop cruel, trop douloureux, trop noir
- petit-ami trop impliqué, balades au clair de lune
- enfant de la mer, impossible de s'en éloigner malgré ce qu'elle a enlevé
- garçon pris pour cible, les ongles peints et les sourires enjôleurs dérangent
- militant acharné, au drapeau rose, jaune et bleu sur les épaules et à la grande gueule face aux détracteurs
- enfant perdu, de retour à la maison, studio trop grand, trop silencieux, besoin de maman pour surmonter tout ça.
pas si fort qu'on ne le croit.
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