half the world away.

un Ses parents, elle les a toujours admiré. Ils sont la force incarnée, le ciment de leur famille. Pourtant, tout n'a pas été rose. La vie a parfois été dure avec eux. Mais ils n'ont jamais baissé les bras, malgré trois enfants. Elle les admire pour ça. Sa mère était institutrice, elle aussi. Son père était militaire. Leur salaire respectif n'était pas si brillant et les absences de leur père était parfois pesante. Néanmoins, jamais leur amour n'a faibli. Elle se rappelle de ces lettres envoyées de son père, parti en mission, que sa mère gardait toujours dans une boite en bois. Elle se souvient de ces moments de tendresse quand ils se retrouvaient enfin. L'amour leur avait fait tout surmonter. Même la douleur. Son père a eu un accident lorsqu'elle six ans. Une mauvaise aventure lors d'une de ses missions. Il en est ressorti avec une prothèse pour son genou. De ce jour-là, il est revenu à la maison, étant démobilisé. Parfois, les nuits étaient difficiles à supporter, se croyant encore là-haut à se battre. D'autres fois, ce sont les jours qui étaient insupportables. Pourtant, jamais il ne se plaignit. Sa mère fit tout ce qu'elle pouvait pour l'aider et porter la famille, malgré son seul salaire. Jamais les rires ne sont partis de la maison, jamais les enfants n'en furent malheureux. Les adultes prenaient sur eux et faisaient de leur mieux pour les plus petits. L'amour était leur mot clef. L'amour pouvait tout supporter et emmenait loin. C'était leur seul leitmotiv à vrai dire. deux Maureen a beau être l’aînée. La tendance a fini par vite s'inverser. Malgré elle. Les trois étaient inséparables, petits. Les quatre cent coups, ils les ont faits jusqu'à parfois rendre dingues leurs parents. Les garçons, surtout le plus grand, le petit suivait, ont vite pris leur rôle très à coeur et ont fini par protéger leur grande soeur. Cette dernière ne s'en plaignait pas au début. Jusqu'à une certaine période. L'adolescence remet parfois tout en question. Elle s'agaçait de voir ses petits frères débarquer dès qu'elle osait approcher un autre garçon. Elle détestait cette protection qui commençait par l'étouffer. Elle a fini par leur dire, par exploser un soir alors qu'ils faisaient fuir un énième garçon. Elle avait le droit d'avoir une vie en dehors de leur trio d'inséparables. Ses frères devraient le comprendre. Ils ont fini par le faire. Sans doute que leurs petites années d'écart avaient eu raison d'eux. Leur petit groupe resterait néanmoins soudés. Ils étaient après tout frères et soeur pour toujours. Rien ne pourrait changer ça. Néanmoins, chacun devait apprendre à avoir sa vie, à pouvoir exister en tant qu'individu en dehors de leur famille. trois C'est sans doute à cause de ses petits frères, ou en particulier du plus jeune. Elle a toujours aidé sa mère avec les plus jeunes. Devenue étudiante, elle a trouvé des petits boulots en tant que baby-sitter. Maureen a donc toujours baigné dans l'univers des enfants. Elle a fini sans doute par s'y habituer ou à ne plus voir sa vie sans ces petites têtes blondes. C'est pour cette raison qu'elle entreprit des études pour devenir institutrice, comme sa propre mère d'ailleurs. Ses études n'ont pas été si faciles. Elle s'est accrochée à son rêve,  son but. Le concours était par exemple terrifiant. Elle avait toujours eu en horreur les oraux. Elle faillit se montrer tétanisée devant ce jury. Elle n'arrivait à placer un mot devant l'autre avant de se rappeler. De ce que pourrait lui apporter ce concours gagné. C'est à partir de ce moment qu'elle prit son envol. Qu'elle devint réellement institutrice. Elle réussit à décrocher son diplôme et l'aventure commençait. quatre Elle en a eu des histoires. Quelques-unes, plus ou moins sérieuses. Certains étaient gentils, d'autres n'avaient aucun avenir avec elle. Et pis, elle a fini par le rencontre lui. Cet homme. Elle devait se rendre à un mariage. Une amie l'avait désignée demoiselle d'honneur. Elle était sans doute la plus pitoyable des demoiselles d'honneur, assise au bar à siroter seule son verre. C'est là qu'il est venu à sa rencontre. Ensemble dans la solitude. C'était une connaissance du marié, d'après ce qu'elle comprit. Ils parlèrent toute la nuit sans réellement s'en rendre compte. Le coup de foudre. C'est de là que c'est parti. D'une discussion à un mariage. Tout s’enchaîna assez vite ou presque. Ils se mirent ensemble. Leur entourage les accueillit avec sourires et bienveillance. C'était évident qu'ils étaient faits l'un pour l'autre. Ils emménagèrent ensemble l'année suivante et deux ans plus tard, il la demandait en mariage. Maureen n'a jamais hésité. Elle pensait qu'il était le bon, qu'il était l'homme qu'elle avait toujours attendu au fond. Elle l'aimait tellement. Tout était d'une logique naturelle pour elle. cinq Quand le mariage fut acquis, le désir d'enfant vint naturellement aussi. Elle en a toujours voulu. Elle ne lui a jamais caché. Pour elle, c'était l'apothéose de sa vie. Elle ne fait pas partie de ces femmes qui se veulent indépendantes et hors système. Parce que ce dernier lui convient très bien. Elle veut des enfants, s'en occuper. Elle n'en est pas moins conservatrice, bien au contraire. Mais les enfants, c'est le fruit d'un amour pur et sincère. Sa concrétisation. Son mari lui donnait cette envie de fonder une famille. Elle savait qu'il ferait un père formidable. Seulement, point noir. Il ne veut des enfants. Ou du moins, il refuse même à en parler. Elle ne comprend pas. Elle tente alors d'aborder le sujet, d'au moins exposer leur deux points de vue. Mais il se braque. Il fuit ou alors termine la discussion en disputes. Elle ne veut pas de ça. De ce climat qui peu à peu dégringole. Elle est peut-être trop insistante. Elle est peut-être trop pressante. Pourtant, elle sait qu'il a toujours été au courant de son désir d'enfants et de famille. Elle aimerait suivre les traces de ses parents, avoir une belle et grande famille heureuse. Mais son mari envoie valser ses questions ou ses tentatives. Il réduit chaque jour à néant ses rêves. six Maureen est une parfaite cuisinière. Son mari le lui fait remarquer souvent. Elle adore ça. C'est une chose qui l'apaise et qui lui rappelle son enfance. Petite, elle montait sur un tabouret et mettait les mains dans la pâte tandis que sa mère la guidait pas à pas. C'est une sorte de thérapie pour elle. Cuisiner, c'est réfléchir à autre chose. C'est s'évader dans des mesures et la création. Loin parfois d'un quotidien qu'elle a de plus en plus de mal à supporter. Son met préféré est bien évidemment la pâtisserie. C'est une grosse gourmande et elle adore la possibilité de création mais aussi de liberté qu'offre ce genre. Evidemment, elle s'occupe aussi des plats salés mais rien n'égalera les desserts. Oh que oui. C'est souvent d'ailleurs qu'elle se met à cuisiner pour ses élèves. En fin d'années, ces derniers lui réclament toujours son fameux gâteau au chocolat ou ses cookies aux m&m's. Un vrai régal pour les papilles. sept Les disputes deviennent quotidiennes. Les remarques insistantes. Jusqu'à cette fameuse discussion. Le point de non-retour peut-être. Il finit par lever la main sur elle. Juste une fois. Peut-être la fois de trop. Elle en fut plus que choquée, tout autant que lui. Elle ne pensait pas qu'il irait jusque là, que ça le touchait à ce point. Elle en a eu peur, elle en a toujours peur d'ailleurs. Elle s'est enfuie mais est finalement revenue. Parce qu'elle sait qu'il l'aime. Que ce n'était qu'une erreur. Après tout depuis, il n'a pas recommencer. Pourtant, elle la sent toujours cette chaleur contre sa joue. Elle a beau l'aimer et elle la sent cette peur qui s’insuffle. Cette peur empreigne leur relation. Elle ne sait comment réagir. Elle se persuade que tout va bien, que ce n'était qu'une fois, qu'il ne recommencera pas. C'est peut-être vrai. Ou peut-être pas. Elle a toujours des excuses pour lui. Elle l'aime. Elle s'accroche alors. Elle se persuade. Mais il y a bien un jour où elle va se réveiller. Cela fera mal. Il voudra pas la lâcher. Et elle non plus. Elle s'enfonce là. Elle est dans une impasse. Elle a besoin d'un sauveur. huit Le quotidien devient plus dur. Moins supportable. Pourtant, l'amour était toujours là. Elle le savait. Elle le sentait. Pourtant, les disputes se poursuivaient ces derniers temps. Cela partait parfois d'un paquet de pâtes ou d'un article de journal. Des broutilles à vrai dire qui se finissaient en batailles rangées. Ils ont fini par toujours être sur leurs gardes à chaque seconde. Peut-être que l'amour s’essouffle ? Peut-être que le quotidien devenait trop monotone pour qu'ils y résistent ? Les questions se succèdent sans que les réponses ne viennent. Leur avenir était différent pour chacun. Elle le voyait avec des enfants, il le voyait sans. Est-ce que cela signifiait la fin de leur relation ? Peut-être bien, oui. Peut-être qu'ils peuvent survivre à tout ça. Elle n'en sait plus rien. Son coeur se serre. Ses mains deviennent moites. Elle ne sait que penser. Que faire.

Elle a les mains dans la farine. Elle a envie de bien faire. Elle adore cuisiner. Cela lui fera tellement plaisir. Elle en est sûre. Quand il rentrera une bonne odeur embaumera leur appartement. La tartre aux fraises, cela a toujours été sa préférée. Elle non plus, ne peut résister aux fraises. Sentir leur gout fruité dans sa bouche. Découvrir l'explosion dans son estomac. C'était ce qu'elle préférait. D'ailleurs elle ne les cuisait jamais. Elle détestait ça. Cuire une fraise serait comme un sacrilège. Ça devient pâteux, amer. Immangeable en somme. Alors elle s'applique. Elle malaxe la pâte comme elle peut avec ses petits bras. Faut bien l'étaler. Qu'elle soit bien régulière. Elle finit par frotter un peu son front avec le haut de son poignet. Ça fatigue la cuisine. Bientôt sa jolie pâte orne son plat. Elle place des haricots secs dessus pis elle l'enfourne. Vingt minutes, c'est parfait. Elle commence à se laver les mains. Quand elle entend la porte. Bash. Ça ne peut être que lui. Elle sourit. Un peu. En ce moment, c'est compliqué entre eux. Ils ont du mal à se comprendre. Ils divergent. Mais elle refuse de le voir. Parce que ça la tuerait. Elle a l'impression de l'avoir toujours aimé. Alors elle se voile la face. Et pis tout ne va pas si mal. Elle s'en convainc chaque jour qui passe. Il le lui prouve parfois. Comme en déposant un baiser sur son front en rentrant. Elle se retourne vers lui tandis qu'il s’assoit à une des chaises de la cuisine. « Tu as passé une bonne journée ? » Il releva un instant sa tête des quelques pubs qu'elle avait elle-même déposées sur la table en revenant du travail. « Bien. On a réussi à avoir un nouveau client. Ça pesait un peu. » Elle acquiesce doucement même si à vrai dire elle n'y comprend pas grand chose. Elle a l'impression qu'il joue à un homme d'affaires enrôlé dans la finance. Pourtant c'est juste un expert comptable dans un cabinet. Rien de bien intéressant. Il s'en plaint parfois. Elle tente de le rassurer. Toujours. « Et toi ta journée ? Pas trop fatiguée avec les enfants ? C'était aujourd'hui ta sortie non ? » Elle penche un peu la tête. Toujours quand elle réfléchit. « Oui, ça va. Ils ont été enchantés de cette journée dans les bois. Des vrais petits scouts. Par contre mon jean est foutu. » Elle fait alors une petite moue. Une conversation banale pour un couple banal. Vous êtes pas un couple nouveau ou alors toujours empreint d'originalité. Non. Ils étaient juste Bash et elle, Maureen. Tout simplement. Après cinq ans, la monotonie commencent à s'installer. Ça lui fait peur. Elle voit l'impasse qui arrive. Et pis elle a envie d'autres choses. Lui ne voit rien. Enfin elle en a l'impression. Il se lève et s'approche d'elle. Il entoure sa taille. Elle est bien dans ses bras. Elle a l'impression de pouvoir conquérir le monde. Elle sent qu'elle pourrait lire le monde sur ses lèvres. Alors elle s'y blottit un peu. Elle entend son rire. Elle aime son rire. Depuis le premier jour. « T'as de la farine dans les cheveux. C'est mignon. » Elle sourit à son tour. Il ne faudrait pas qu'elle oublie non plus la tarte qui cuisait dans le four d'ailleurs. Mais c'est loin de ses pensées pour le moment. Elle veut oublier l'univers là, sa tête contre son torse. Pis elle se souvient d'un truc. Juste un truc. « Oh. J'ai oublié de te dire. Juliet vient d'avoir son bébé. C'est un petit garçon. » Rien qu'en en parlant, elle se sent heureuse. Les enfants, ça l'a toujours mise de bonne humeur. Vraiment. Un jour elle aimerait bien avoir un bien à elle. Un parfait mélange d'elle et lui. Oui. Ça serait son désir le plus fou. Après tout, elle commence à dater. Trente-et-un ans. C'est beaucoup. Beaucoup de femmes ont déjà au moins deux enfants à cet âge-là. Et ça lui fait mal un peu. Vraiment. Elle aimerait devenir maman. Pouvoir bercer un enfant. Lui apprendre les bases de la vie. Un fruit de leur amour. Oui c'est vraiment ça qu'elle aimerait. « Oh. C'est bien. » C'est tout ce qu'il lui répond. Ils ont déjà abordé le sujet. Et ça s'est mal terminé. Elle aimerait bien qu'il ait les mêmes aspirations qu'elle. Car sinon ils vont dans le mur. Elle ne le comprend pas. Elle l'a toujours vu protecteur avec sa soeur. Sa très jeune soeur. Presque comme un père. Mais il semblait se fermer avec elle. Comme une huître. Ça lui faisait mal. Trop. Il ne l'avait jamais écartée de quelque chose. Jusqu'à aujourd'hui. Alors elle essaye encore un peu. Juste un tout petit peu. « Tu sais peut-être qu'on pourrait... » Elle ne finit pas sa phrase. Parce qu'elle est comme une enfant. Elle a peur de la suite. De ses paroles. Et ça ne se fait pas attendre. Il soupire et se détache d'elle. Elle se sent tout de suite vide. « Ne commences pas Maureen. On en a déjà parlé. Le sujet est clos. C'est pas le moment. » Il s'éloigne d'elle. Comme toujours. Son ton est devenu froid. Elle, elle se pétrifie. « On en a pas parlé. Tu en as parlé. Mais pas avec moi. C'est toi qui fermes le sujet. Mais tu vois, moi je veux en parler. » Elle dit. Ça commence à l'énerver. Toujours ces mêmes paroles. Pas le moment. Pas maintenant. Le sujet est clos. Elle commence à en avoir marre. Toutes ces divergences, ça la mine. Parce que le sujet des enfants n'est pas le sujet. Malheureusement. Vous pouvez vous quereller à propos du sel parfois. D'autres fois à cause du programme à la télévision. Pour un rien en fait. « Pour dire quoi, Maureen hein ? Pour dire que je n'en veux pas, que toute cette discussion mènera à rien. Que l'on va juste s’engueuler à cause de ça ? C'est ce que tu veux ? » Le ton commence à monter. Mais elle, elle ne se démonte. Parce qu'elle aussi, elle commence à voir rouge. Elle n'aime pas ça. Mais c'est plus fort qu'elle. Son côté euphorique s'éteint. « Je veux juste qu'on en parle ! C'est trop te demander hein ? » Elle le regarde. Presque avec espoir. Mais il semble s'être refermé. Comme une huître. Elle soupire. Elle abandonne. Encore une fois. « Tu sais quoi ? Laisse tomber. Oublie. » Elle veut juste partir. Parce qu'elle sent que ça monte entre eux. Elle n'aime pas ça. Elle aimerait tellement que tout cela cesse. Que tout redevienne comme avant. Mais c'est pas possible. Ils sont bien trop lancés pour qu'ils puissent arrêter. Son coeur s'affole. Il tente de l'avertir. Mais elle est aveugle. L'agacement et l'irritation l'agace. Alors elle commence à partir. Vers le salon. Elle pourra se calmer là-bas. Lui aussi. Surtout lui. Mais il attrape son bras. Elle a presque un espoir dans les yeux. Il ne le voit pas. Ses paroles sont tranchantes. « Je croyais que tu voulais en parler. Mais tu préfères fuir. C'est mieux t'as raison. » Elle tenta de dégager son bras. En vain. Il avait une sacré poigne Bash. Plus que sa pauvre force de libellule tiens. « Je fuis ? Moi ? T'es sérieux ou tu le fais exprès ? C'est pas moi qui fuis tout le temps le sujet. C'est toi le lâche dans cette affaire. C'est toi Bash ! » Elle réplique. Sa voix est forte. Elle voit rouge. Lui aussi. Et pis elle ne la voit pas arriver celle-là. La baffe. Il a osé porter la main sur elle. Elle est surprise. Presque autant que lui. Elle porte sa main à sa joue. C'est presque encore chaud. Il s'éloigne déjà lui. Elle ne voit pas dans ses yeux qu'il regrette déjà. Elle est choquée. Elle n'aurait jamais pensé. Alors elle fait quelques pas en arrière alors qu'il en fait un vers elle. Il semble désolé. Elle ne le voit pas. « Maureen... » Elle lève la main. Pouce. Temps mort. « Ne m'approche pas. » Elle sent déjà les larmes venir. Elle les retient. Tant bien que mal. Pis elle s'enfuit. Elle se précipite vers la porte. Elle ne l'entend même pas l'appeler. Non. Rien. Il cherche même pas à la retenir. Il reste encore bouche bée. Elle, elle s'enfuit. Elle se réfugie dans l'ascenseur de l'immeuble. Elle a de la chance. Il est vide. Là ses larmes coulent. Elle ne peut pas les retenir. Tout s'est passé si vite. En quelques phrases simplement. Elle n'aurait jamais pensé que ça arrive. Bash était un ange. Un véritable petit angelot. Pourquoi. Cette question tourne en boucle dans sa tête. Pas de réponses. Et ça la rend folle. Alors elle essuie ses larmes. Elle a pas fière allure devant le miroir de l’ascenseur. Elle entoure son buste de ses bras. Elle ne se sent pas bien. Mais elle tient bon. Elle essaye de se faire un visage. Si on la voit comme ça dans l'immeuble. Ça va jaser. Elle s'en fout dans un sens. Dans l'autre non. Elle s'essuie encore les joues. Elle est bien pathétique à vrai dire. Elle souffle un coup. Elle est bien ici. Dans ce cocon. Ça la rassurerait presque. Pourtant, ça n'a pas duré. Les portes de l'ascenseur s'ouvre sur le rez-de-chaussée. Elle a réussi à ne pas s'effondrer. Elle sort en resserrant les pans de son gilet autour d'elle. Elle a besoin de marcher. De prendre l'air. Elle traverse le hall d'entrée. En espérant qu'elle ne croiserait personne. En vain. En effet, elle a à peine atterri devant les boites aux lettres que la porte de l'immeuble s'ouvre. Elle entend les cris d'un enfant et la voix réconfortante d'un père. Elle préfère faire mine de prendre son courrier. Heureusement elle avait les clefs dans sa poche de gilet. Elle ouvre alors la petite porte. Il y a quelques lettres dedans. Sans doute des pubs. Mais elle s'y intéresse comme jamais. C'est alors qu'elle entend sa voix. Posée. Calme. « Bonjour. » Elle relève le visage vers lui. Elle sourit. Comme elle peut. Son voisin de palier. Elle ne le connait que très peu. Juste quelques paroles échangées. Des services par-ci par-là. « Oh. Bonjour. » Son ton est enjoué. Même si son coeur n'y est pas. Il s'éloigne déjà avec sa fille. Il se doute de rien. Elle a toujours espéré que les récentes disputes avec Bash ne traversent pas les murs. Apparemment pas. Ou alors il a la politesse de ne rien demander. Elle l'en remercierait presque. Quand enfin il a disparu au fond du couloir, elle souffle un bon coup. Elle a pas envie de remonter. Mais elle sait qu'elle le fera. Parce qu'elle l'aime. Parce qu'elle ne le croit pas capable de recommencer. Mais elle a toujours peur. Elle aura toujours peur. Elle est dans une impasse. Elle a besoin d'un sauveur. Et vite.