(un) Sa foi intransigeante rivalise avec son mode de vie, que certains qualifieraient de décadent. Meghan est à la fois cette catholique pratiquante qui ne rate jamais la messe du dimanche et cette femme furieusement indépendante, qui aime un peu trop faire la fête, et tout ce qui va avec. Son penchant pour le whisky et la cigarette finiront par la tuer, ou du moins l'éloigner de la plongée, mais elle a choisi d'ignorer cette possibilité.
(deux) Mouton noir de la famille Ainsboro ? C'est surtout elle qui se voit ainsi. Meghan, elle est celle qui devait faire une grande carrière, à l'instar de son aîné. Elle se souvient encore de la déception de sa mère, lorsqu'elle lui a annoncé qu'elle ne rentrerait pas à Dublin et qu'elle ne poursuivrait pas sa thèse. Elle est
celle qui a pété un plomb. Daddy a toujours été plus taciturne, mais elle sait qu'il aurait préféré la voir se marier et devenir mère. A l'approche de la trentaine, Meghan n'est dans aucune de ces situations.
(trois) Fille de la mer. Issue d'une famille de pêcheurs, Meghan a un rapport ambigu à celle-ci. Entre amour et méfiance, entre passion et colère. A l'âge de cinq elle savait nager, à huit ans elle prenait ses premières leçons de voile, à treize ans elle se découvrait une passion pour les fonds marins. Meghan a fini par devenir monitrice de plongée. Une possibilité à l'issue d'une période étrange, où rien ne semblait devoir être. Si son quotidien est la plongée avec bouteilles, c'est pourtant l'apnée, qu'elle a découvert bien des années plus tard, qu'elle chérit en tant que discipline.
(quatre) Passionnée voir colérique, Meghan ne fait jamais les choses à moitié. Si le bonheur la rend rayonnante, la tristesse la plonge dans une abysse sans fond, tandis que la colère la plonge dans la folie. Ce fut la pratique du yoga qui lui apprit à canaliser ce trop-plein d'émotions, il y a de cela quelques années. Aujourd'hui encore, Meghan se rend à plusieurs cours par semaine, et pratique la méditation avant chaque plongée. Si miracle il n'y a pas eu, le yoga lui a apporté une rigueur qui lui faisait jusqu'alors défaut.
(cinq) Elle présente à la fois cette ouverture sur le monde et ce profond attachement à la terre. Meghan est une grande voyageuse. Si elle connaît surtout l'Europe, ayant une affection particulière pour les Cyclades, elle a également eu la chance de visiter New York et ne demande qu'à découvrir davantage l'Amérique. Pourtant, elle est aujourd'hui certaine que l'Irlande est sa maison et n'envisage plus s'installer ailleurs.
(six) Elle a fait l'acquisition de cette ruine, comme elle aime dire, il y a un an. A peu près au même moment où elle a rencontré Jack. Un vieux cottage où tout est à refaire, mais au grand potentiel. Il l'aidait à retaper la baraque, tandis que ses sentiments pour lui grandissaient. Une histoire qui devenait sérieuse, des projets qui se dessinaient. Jusqu'à ce qu'il soit celui qui lui annonce la disparition de son père. Ce jour-là, sa vie s'est écroulée et Meghan l'a rejeté.
(sept) Elle a toujours eu du mal à se projeter. Mis à part avec cet homme qui l'a durement marquée. Avec lui, elle avait imaginé sa vie, les prénoms qu'ils donneraient à leurs enfants. Jusqu'à ce qu'il la jette du jour au lendemain. Elle avait vingt-cinq ans. Hormis lui, sinon Meghan n'a jamais pu se voir vieillir. Il a été une parenthèse. Après lui, elle a décidé qu'elle vivrait pour elle, au jour le jour. Sans doute est-ce la raison, au moins en partie, de la détresse qu'elle ressent depuis la disparition de son père. Elle n'a jamais imaginé qu'elle devrait vivre sans eux : tout au plus, elle avait pensé à la possibilité qu'ils devraient lui survivre à elle.
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